30 km2 : c'est la surface estimée de Chichen Itza (Schmidt, 2005). À 1,5 km à l'ouest de la pyramide surnommée El Castillo, le groupe des Séries initiales est un havre de paix : loin du tumulte des vendeurs non-autorisés et des cohortes de touristes guidés par des personnes parfois peu regardantes, les archéologues y travaillent tranquillement. Un accord entre le gouvernement de l'état du Yucatán et l'INAH a permis de reprendre des fouilles d'envergure et d'effectuer d'importants travaux de restauration et consolidation de plusieurs bâtiments-clé : le terrain de jeu de balle, le Temple des Guerriers, l'Église sont des endroits symboliques que voient les visiteurs.
Contextualisons un peu notre billet en rappelant la chronologie d'occupation de Chichen Itza ou Uucyabnal, nom de la ville apparaissant dans les inscriptions relevées (Schmidt, González de la Mata, Pérez Ruiz, Osorio León, 2005).
Trois fronts de fouilles ont donc été menés dans le groupe de la Sérié Initiale. Le premier se situe la Galerie-cour de la Lune : il s'agit d'une salle hypostyle au toit plat soutenu par des poutres en bois. Les parois intérieures étaient couvertes de stucs. Sur les 36 colonnes qui rythment cette cour, seules 16 ont été dégagées pour l'instant Des tessons de céramiques ont permis d'établir une première temporalité, vers 900 de notre ère. Les deux coordinateurs du projet considèrent l'hypothèse d'un bâtiment ayant servi pour des réunions d'ampleur.
Pour clore ce billet, nous vous invitons à jeter un œil sur ce reportage publié sur la chaîne INAHTV il y a quelques jours. Vous pourrez ainsi mettre en perspective ce que nous venons de vous rapporter.
Le projet de recherches entrepris à Chichen Itza, mais aussi à Uxmal et à Kuluba montre en tout cas deux choses : les autorités locales tiennent partiellement leur promesse en matière de reversement de l'impôt, anticonstitutionnel pourtant, à la conservation d'un patrimoine archéologique qui est la vitrine pour des touristes toujours aussi nombreux. Vous pourrez d'ailleurs entendre trois entretiens avec les restauratrices en charge des travaux au Temple des Guerriers, au Terrain de jeu de balle et à l'Église dans les prochaines semaines sur notre carnet Raíces. Cette volonté politique confirme une tendance déjà observé au Guanajuato où c'est l'état qui remplace les autorités fédérales pour le financement de ces travaux. Est-ce un exemple qu'on verra se généraliser dans tout le Mexique dans la mesure où l'état fédéral se désengage notablement de la recherche scientifique depuis plusieurs années.
Contextualisons un peu notre billet en rappelant la chronologie d'occupation de Chichen Itza ou Uucyabnal, nom de la ville apparaissant dans les inscriptions relevées (Schmidt, González de la Mata, Pérez Ruiz, Osorio León, 2005).
- Yabnal/Motul, 600-830 d.n.e. est la période céramique la plus ancienne;
- Huuntun/Cehpech, 800-950 d.n.e.,
- Sotuta-Sotuta, 920-1200 d.n.e.,
- Kulub/Hocaba, 1000-1300 d.n.e.,
- Chenku/Tases, 1250-1550 d.n.e.
- le style Yabnal (650-780 d.C.), caractérisé par des stucs modelés et polychromes,
- le style Maya Chichén (780-950 d.C.) correspondant aux sites de la région Puuc (Uxmal, Sayil, Kabah, Labna, etc.),
- le style Chichén Itzá (950-1150 d.C.) aux pyramides et plateformes à escaliers décorées de serpents à plumes.
Deux archéologues de l'INAH Yucatán dirigent les fouilles entreprises dans cinq groupes architecturaux situés entre les Séries initiales et le Complexe des Nonnes: José Osorio León et Francisco Pérez Ruiz. Leur enregistrement a combiné des relevés effectués grâce à la désormais bien connue technologie LiDAR et des explorations traditionnelles au sol. Chaque groupe compte plusieurs dizaines de structures. Quatre de ces grands ensembles semblent avoir servi comme habitations. La présence de rejolladas, dépressions géologiques n'atteignant pas les nappes phréatiques et asséchées en dehors de la saison des pluies (Munro-Stasiuk, Manahan, Stanton & Ardren, 2014, 156), permettront de mieux connaître les activités de populations n'appartenant pas à l'élite de Chichen Itza. Car le plan utilisé depuis les années 1930 par les archéologues du Carnegie Institute of Washington fait la part belle aux constructions les plus massives mais aussi les plus importantes d'un point de vue politique et rituel (Ruppert, 1952; Morris, Axtell Morris, Charlot, 1931), ignorant les ensembles architecturaux de moindre taille et pourtant significatifs.
Trois fronts de fouilles ont donc été menés dans le groupe de la Sérié Initiale. Le premier se situe la Galerie-cour de la Lune : il s'agit d'une salle hypostyle au toit plat soutenu par des poutres en bois. Les parois intérieures étaient couvertes de stucs. Sur les 36 colonnes qui rythment cette cour, seules 16 ont été dégagées pour l'instant Des tessons de céramiques ont permis d'établir une première temporalité, vers 900 de notre ère. Les deux coordinateurs du projet considèrent l'hypothèse d'un bâtiment ayant servi pour des réunions d'ampleur.
![]() |
Colonnades de la Galerie-cour de la Lune, Chichen Itza. Photo : Mauricio Marat / INAH. |
![]() |
Consolidation de la Maison des Conques. Photo : Mauricio Marat, INAH. |
Le second consiste en une banquette qui appartenait probablement à un autre édifice avant d'être déplacée à l'intérieur de la Maison des Coquillages. Long d'1,6 m et large d'1,27m, ses quatre bords sont sculptées d'une procession de 34 personnages et présente quelques traces de polychromie. L'iconographie reprend celle observable sur la banquette du Marché ou dans le Temple Supérieur des Jaguars avec un groupe de 18 captifs aux mains attachés par une corde et accompagné d'un groupe de 16 capteurs. Selon Osorio, c'est la première qu'on retrouve une pierre taillée avec ces caractéristiques.
![]() |
Banquette, Maison des Coquillages, Chichen Itza. Photo: Mauricio Marat, INAH. |
Ce projet de fouilles est accompagné d'un programme de consolidation, conservation et restauration sur trois structures emblématiques de Chichen Itza. L'Église est un cas tout à fait intéressant. Représentée depuis le XIXe siècle, notamment dans les voyages de Stephens et Catherwood, elle a bénéficié d'un nettoyage complet de son toit et de ses façades.
![]() |
L'Église, Chichen Itza. Photo : Marco Antonio Santos, INAH Yucatán |
Le Temple des Guerriers, notamment sa sous-structure invisible pour le public, a bénéficier d'un toilettage bien particulier : les colonnes sculptées polychromes ont souffert de l'humidité et des sels qui matissent les couleurs et les endommagent. Elles ont donc subi un traitement à base de nanoparticules d'hydroxyde de calcium, autrement dit, de la chaux. Des hygromètres ont été installés afin de surveiller en permanence l'humidité qui y règne. Au moment de procéder au nettoyage du chac mool qui marque l'entrée du temple proprement dit, l'équipe de Claudia García a détecté la présence d'un disque en pyrite de 30 de diamètre. L'objet a été envoyé à l'atelier de restauration du Centre INAH, pour y être réintégré. Il est curieux que les archéologues du Carnegie Institute of Washington soient passé à côté de cet objet.
Enfin les reliefs et les banquettes qui délimitent la partie basse du Grand terrain de jeu de balle ont également fait peau neuve, sous la direction de la restauratrice Claudia Ocampo. Là encore ce sont l'humidité et le développement de micro-organismes qui empêchaient une lecture claire des reliefs. Certains fragments s'étaient même détachés et ont pu être réintégrés.
Pour clore ce billet, nous vous invitons à jeter un œil sur ce reportage publié sur la chaîne INAHTV il y a quelques jours. Vous pourrez ainsi mettre en perspective ce que nous venons de vous rapporter.
Le projet de recherches entrepris à Chichen Itza, mais aussi à Uxmal et à Kuluba montre en tout cas deux choses : les autorités locales tiennent partiellement leur promesse en matière de reversement de l'impôt, anticonstitutionnel pourtant, à la conservation d'un patrimoine archéologique qui est la vitrine pour des touristes toujours aussi nombreux. Vous pourrez d'ailleurs entendre trois entretiens avec les restauratrices en charge des travaux au Temple des Guerriers, au Terrain de jeu de balle et à l'Église dans les prochaines semaines sur notre carnet Raíces. Cette volonté politique confirme une tendance déjà observé au Guanajuato où c'est l'état qui remplace les autorités fédérales pour le financement de ces travaux. Est-ce un exemple qu'on verra se généraliser dans tout le Mexique dans la mesure où l'état fédéral se désengage notablement de la recherche scientifique depuis plusieurs années.
Bibliographie
Gómez, A. (1998). Los mayas y las exploradoras y arqueólogas del pasado, Arqueología Mexicana, 29, 50-55. [en línea] https://arqueologiamexicana.mx/mexico-antiguo/los-mayas-y-las-exploradoras-y-arqueologas-del-pasado
Numerosos hallazgos en Chichén Itzá derivan del trabajo entre el INAH y el Gobierno de Yucatán, Boletín INAH. [en línea] https://www.inah.gob.mx/boletines/8785-numerosos-hallazgos-en-chichen-itza-derivan-del-trabajo-entre-el-inah-y-el-gobierno-de-yucatan
Morris, E. H., Charlot, J., Morris, A. A., (1931). The Temple of the Warriors at Chichen Itza, Yucatan (Vol. 2). Washington: Carnegie Institution of Washington.
Munro-Stasiuk, M. Manahan, T., Stockton, T. & Ardren, T. (2014). Spatial and Physical Characteristics of Rejolladas in Northern Yucatán, Mexico: Implications for Ancient Maya Agriculture and Settlement Patterns. Geoarchaeology, (29)2. DOI:10.1002/gea.21468. [archivo pdf] https://www.researchgate.net/deref/http%3A%2F%2Fdx.doi.org%2F10.1002%2Fgea.21468
Ruppert, K. (1952). Chichen Itza: architectural notes and plans. Washington: Carnegie Institute of Washington.
Gómez, A. (1998). Los mayas y las exploradoras y arqueólogas del pasado, Arqueología Mexicana, 29, 50-55. [en línea] https://arqueologiamexicana.mx/mexico-antiguo/los-mayas-y-las-exploradoras-y-arqueologas-del-pasado
Numerosos hallazgos en Chichén Itzá derivan del trabajo entre el INAH y el Gobierno de Yucatán, Boletín INAH. [en línea] https://www.inah.gob.mx/boletines/8785-numerosos-hallazgos-en-chichen-itza-derivan-del-trabajo-entre-el-inah-y-el-gobierno-de-yucatan
Morris, E. H., Charlot, J., Morris, A. A., (1931). The Temple of the Warriors at Chichen Itza, Yucatan (Vol. 2). Washington: Carnegie Institution of Washington.
Munro-Stasiuk, M. Manahan, T., Stockton, T. & Ardren, T. (2014). Spatial and Physical Characteristics of Rejolladas in Northern Yucatán, Mexico: Implications for Ancient Maya Agriculture and Settlement Patterns. Geoarchaeology, (29)2. DOI:10.1002/gea.21468. [archivo pdf] https://www.researchgate.net/deref/http%3A%2F%2Fdx.doi.org%2F10.1002%2Fgea.21468
Ruppert, K. (1952). Chichen Itza: architectural notes and plans. Washington: Carnegie Institute of Washington.
Schmidt, P. (2005). Nuevos hallazgos en Chichén Itzá, Arqueología Mexicana, 76, pp. 48-55. [en línea] https://arqueologiamexicana.mx/mexico-antiguo/nuevos-hallazgos-en-chichen-itza
Schmidt, P., González de la Mata, R., Pérez Ruiz, F., & Osorio León, J. (2005). Chichén Itzá. Poder y esplendor entre guerra, el comercio y las flores, Arqueología Mexicana, 76, . [URL] https://arqueologiamexicana.mx/mexico-antiguo/chichen-itza-poder-y-esplendor-entre-la-guerra-el-comercio-y-las-flores
Schmidt, P., González de la Mata, R., Pérez Ruiz, F., & Osorio León, J. (2005). Chichén Itzá. Poder y esplendor entre guerra, el comercio y las flores, Arqueología Mexicana, 76, . [URL] https://arqueologiamexicana.mx/mexico-antiguo/chichen-itza-poder-y-esplendor-entre-la-guerra-el-comercio-y-las-flores
Commentaires