Les musées réservent (si j'ose dire) de singulières surprises. Celle rapportée par le quotidien La crónica montre que le pillage n'est pas toujours une fatalité. Des archéologues de l'Université Brown et du Musée métropolitain d'art du Smithsonian Institute, situé à Washington, ont mis la main sur le fragment d'une sculpture qui pourrait appartenir à un linteau de la cité maya de Tikal, au Guatemala. L'hypothèse de l'origine tikalienne de ce fragment est rendu possible par une longue enquête extrêmement documentée.
James Doyle, archéologue et collaborateur du Metropolitan Museum of Art, revient sur les circonstances de cette découverte fortuite. Comme souvent dans les sciences, elle a lieu alors que l'objectif initial des chercheurs était assez différent. Il s'agissait en première instance d'étudier le rôle social des statuettes mayas en bois. Or les archéologues sont tombés sur un fragment de bois sculpté haut de 27 cm qui représente un visage humain de profil. L'objet montre des coups de hachette ou de machette, quatre ou cinq sur la partie supérieure. D'autre part, des objets pointus ont été utilisés à 3 reprises pour mutiler volontairement la bouche de ce visage. Cette mutilation semble pourtant antérieure à la première et pourrait être préhispanique : il s'agirait alors probablement d'un geste volontaire.
Dans son article publié en collaboration avec S. Houston par la revue Mexicon (2014), la tête devait être orné d'une coiffe car les traces d'un bandeau sculpté sont encore visibles sur le front du personnage.
Cet objet est catalogué 247221 au Musée métropolitain d'art depuis 1907 lorsqu'il fut donné par Leonard Wailes qui avait voyagé, travaillé et acquis une série d'objets durant un séjour en Amérique centrale à la fin du XIXe siècle.
Dans son article publié en collaboration avec S. Houston par la revue Mexicon (2014), la tête devait être orné d'une coiffe car les traces d'un bandeau sculpté sont encore visibles sur le front du personnage.
Cet objet est catalogué 247221 au Musée métropolitain d'art depuis 1907 lorsqu'il fut donné par Leonard Wailes qui avait voyagé, travaillé et acquis une série d'objets durant un séjour en Amérique centrale à la fin du XIXe siècle.
Les études botaniques ont permis de déterminer l'essence de l'arbre sculpté vers 700 de notre ère. Il s'agit de chicozapote (manilkara zapota), dont la sève élastique est encore utilisée pour la fabrication de pâte à mâcher.
"Manilkara-zapota-yucatan" by Luis Fernández García - Own work.
Licensed under CC BY-SA 2.5 es via Wikimedia Commons.
Doyle et Houston ont donc essayé de retracer le cheminement de ce fragment en observant la documentation accumulée pour les linteaux des temples I, II, III et IV. Les deux archéologues s'inclinent plutôt vers un des deux premiers édifices. Ils ont effectué des comparaisons avec des relevés d'explorations entreprises à la fin du XIXe et au début du XXe siècle et estiment que ce petit fragment conservé au Smithsonian ait appartenu au linteau 2 du Temple II ou au linteau 3 du Temple I.
"Tikal map" by Simon Burchell - Own work.
Licensed under CC BY-SA 3.0 via Wikimedia Commons.
On sait que le Temple I ou Temple du Grand Jaguar a servi de dernière demeure pour le souverain Jasaw Chan (Kan) K'awiil (682-721). Deux morceaux de ses linteaux sont actuellement au British Museum, après que Maudslay obtint l'autorisation de les emporter.
"Temple1 Tikal" by Elelicht - Own work.
Licensed under CC BY-SA 3.0 via Wikimedia Commons.
Le Temple II, appelé encore Temple des Masques ou Temple de la Lune a été également commandité par Jasaw Chan K'awil, le vainqueur de la grande ennemie Calakmul) vers 700 de notre ère en l'honneur de son épouse 12 Perroquet (Martin and Grube, 2008: 44-47). Son visage a été sculpté sur un linteau aujourd'hui conservé au Musée d'Histoire Naturelle de New York.

"Belize-tikal" by yogi - Flickr.
Licensed under CC BY-SA 2.0 via Wikimedia Commons.
Bibliographie :
Doyle, J., & Houston, S. (2014). Confederate Curio: A Wooden Carving from Tikal, Guatemala. Mexicon, XXXVI(5), 139-145. Tiré de : https://jamesdoyle1.files.wordpress.com/2012/06/doyle_houston2014.pdf, le 19/02/2015.
Martin, S. & Grube, N. (2008). Chronicle of the Maya Kings and Queens. Deciphering the Dynasties of the Ancient Mayas. Londres: Thames & Hudson.
Martin, S. & Grube, N. (2008). Chronicle of the Maya Kings and Queens. Deciphering the Dynasties of the Ancient Mayas. Londres: Thames & Hudson.
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