La chute de Tenochtitlan est certainement une date fondatrice dans l'Histoire officielle mexicaine. Beaucoup croient qu'elle marque la fin de la résistance des peuples autochtones de cette partie du monde contre l'invasion castillane orchestrée par un Hernan Cortés aux abois et qui ne put finalement pas profiter de ses prouesses militaires.
La chute de Mexico par Cortés. anonyme du 18e siècle. En ligne le 13/08/2016 sur: https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/2/25/The_Conquest_of_Tenochtitlan.jpg. |
Ce même épisode est lui-même rempli d'épisodes romancés, exagérés ou créés de toute pièces. D'autres ont tout simplement été placés sous silence. L'histoire est ainsi faite que c'est le vainqueur qui impose sa vision des choses au final. Faisons donc un rapide tour de la chose.
Tout d'abord il convient de rappeler que la chute de Tenochtitlan ne marque pas la fin des expéditions militaires pour l'envahisseur castillan et catholique. La Conquête fut un processus long, acquis par le biais de négociations ardues comme par les armes. La fin de la lutte armée contre les populations autochtones peut raisonnablement actée lors de la Bataille de Tayasal, îlot situé sur le lac Peten Itza, au Guatémala en 1697 ! Cortés fut même d'ailleurs le premier à se casser les dents lors d'une expédition contre le groupe maya appelés Itzaes.
Les chroniqueurs coloniaux, bien relayés par les traditions populaires, enjolivèrent probablement l'arrêt de Cortés à Popotla, actuellement quartier populaire au nord de Mexico, près du village de Tlacopan, lors de la retraite précipitée consentie par les soldats espagnols lors de l'abandon du Palais d'Axayacatl et du massacre de Toxcatl. Profondément peiné par cette déroute au cours de laquelle de nombreux Espagnols périrent noyés dans la lagune, le natif d'Estrémadure fit une halte contre un saule (ahuehuete en nahuatl) et y laissa couler quelques larmes. L'arbre de Popotla (ou plutôt ce qu'il en reste) est encore visible aujourd'hui. Mais Popotla étant alors dans une région particulièrement boisée, rien ne permet de garantir que il s'agit bien de l'arbre où Cortés décida de pleurer les siens. Dommage qu'il n'ait pas eu la même humanité lorsque Pedro de Alvarado ordonna le massacre de Toxcatl.
Massacre de toxcatl. Durán (1880) Disponible le 13/08/2016 : https://es.wikipedia.org/wiki/Archivo:Matanza_templo2.jpg. |
Terminons par une dernière légende urbaine, récemment traitée par Eduardo Matos Moctezuma dans la revue Arqueología mexicana : la mort de Moctezuma II. Chroniqueurs castillans et descendants de pipiltin mexicas se rejettent mutuellement la responsabilités. Pour les premiers, le souverain mexica perdit toute autorité auprès de son peuple et lors d'un ultime effort pour négocier la sortie sans violence des Espagnols et de leurs alliés enfermés dans le palais d'Axayacatl, il faut assommé puis lapidé par les Mexicas. Pour les chroniqueurs locaux, ce sont les envahisseurs qui organisèrent le régicide : lors de la fête de Toxcatl en juin 1520, les pipiltin qui devaient participer aux cérémonies sans arme sur ordre espagnol furent massacrés sans coup férir, Pedro de Alvarado craignant une rébellion des Mexicas. Ils trouvèrent les corps sans vie et souillés en entrant dans le Palais d'Axayacatl.
Les récits que nous venons de faire ne sont que quelques exemples de la grande complexité à écrire et rapporter l'histoire. Ils imposent à l'ethnohistorien et au chercheur moderne une grande prudence autant dans la description que l'interprétation des faits. À vous maintenant de vous faire votre idée...
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