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Sacré monticule 11...

En mai dernier, nous revenions en détail sur une découverte majeure faite sur le site chiapanèque de Chiapa de Corzo. Une équipe américano-mexicaine avait mis la main sur une très belle tombe, probablement royale, préparée il y a environ 2700 ans, surprenant ainsi la communauté américaniste. Aujourd'hui rebelote si j'ose dire. En poursuivant leurs recherches, les archéologues Bruce Bachand, Emiliano Gallaga et Lynneth Lowe viennent seulement d'annoncer une nouvelle découverte faite en mai. 

Une autre tombe, situé directement à l'est de la première a révélé la présence de deux hommes adultes. Même si leur état de conservation était bien moindre que celui du premier enterrement, la tombe a révélé des offrandes riches qui laissent penser que ces deux individus accompagnaient un troisième dans son voyage vers l'inframonde. Lynneth Lowe explique que la fouille n'a pas été aussi aisée. Une partie des grands tableaux en bois qui recouvraient la zone a cédé sous le poids de la terre accumulée et a réduit les fragments osseux (crânes et vertèbres) à l'état de morceaux.

Lowe confirmer les liens de ce site zoque avec la zone olmèque sur la côte atlantique si on en croit les traits d'un visage taillé sur un pendentif retrouvé parmi le mobilier funéraire. Plus surprenant est le matériau utilisé pour créer cette pièce : il s'agit d'un morceau de carapace de tortue !

 Pendentif avec visage olmécoïde, Monticule 11, Chiapa de Corzo.
Photo : INAH, disponible le 3 décembre 2010 sur http://goo.gl/eQFJ6 .

Relief olmécoïde, détail d'un pendentif.
Monticule 11, Chiapa de Corzo, Préclassique moyen.
Photo E. Gallaga y H. Montaño-INAH, disponible le 3/12/2010 sur http://goo.gl/1LK52 .

Sur un autre pendentif en fer, c'est la silhouette d'un cerf qui a été gravée.

Pendentif gravé d'une silhouette de cerf, fer.
Monticule 11, Chiapa del Corzo, Préclassique moyen.
Photo E. Gallaga y H. Montaño-INAH,
disponible le 3 décembre 2010 sur : http://goo.gl/ERrRI .

Mais les offrandes retrouvées seraient à rapprocher d'une certaine conception de l'inframonde. En témoigne la présence d'un crâne de crocodile : dans les mythes aztèques du Postclassique (Historia de los Mexicanos por sus pinturas), on apprend que la terre avait la forme d'un caïman ou un crocodile écartelé par les dieux Quetzalcoatl et Tezcatlipoca. Cinq vaisselles en céramiques, des conques et coquillages, des restes de différents animaux, un ornement formé de dizaines de dents de canidé, une carapace de tortue, un petit collier de perles de jade et les fragments de deux masques en os constituent cet inventaire qui rappellent à bien des égards l'inframonde telle que le concevaient les peuples mésoaméricains. Mais cette liste ne serait être complète si on mentionnait pas la présence de petites haches de pyrite ou de jadéite. Celle présentée sur le cliché suivant semble avoir été soit inventoriée, soit découverte en mai dernier.

Hache n°326, jadéite.
Monticule 11, Chiapa de Corzo, Chiapas.
Photo : E. Gallaga y H. Montaño-INAH, disponible le 3/12/2010 sur http://goo.gl/C0w8m .

Les archéologues ont donc acquis la conviction que le Monticule 11 avait une fonction essentiellement funéraire. Désormais des analyses C14 et d'ADN chercheront à établir des liens entre les deux enterrements découverts cette année au même endroit. Des dents, retrouvées sont certainement l'exemple le plus ancien d'incrustations en jade et en coquillage de toute la Mésoamérique, seront également soumises à des analyses plus poussées.

En outre les études de médecine légale effectuées sur les quatre corps du premier enterrement ont confirmé les hypothèses faites alors. Autour d'un homme âgé d'une cinquantaine, on avait retrouvé trois accompagnants : un enfant en bas âge, un jeune adulte d'une vingtaine d'années, et une femme du même âge que le principal personnage.

Pour en savoir plus, vous pouvez toujours lire le bulletin de l'INAH en cliquant sur le titre de cette note et voir l'intégralité du diaporama de la découverte ici. On en viendrait à regretter la fin des fouilles à Chiapa de Corzo avant son ouverture en 2012. Place désormais à la consolidation des monuments fouillés. En attendant une petite vidéo valant souvent plus que de longs discours, pensez à regarder celle postée par l'INAH sur sa chaîne Youtube.


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