Le chercheur français Patrick Johansson, enseignant à l'UNAM et grand spécialiste des peuples nahuas de l'époque préhispanique a-t-il raison de s'entremettre dans les relations diplomatico-culturelles entre le Mexique et l'Autriche ?
Petit rappel des faits. Le 5 novembre 1519, un acte notarié catalogue des présents faits par le huey tlatoani tenochca Moctezuma à Cortés. Parmi eux figure une coiffe de plumes vertes de quetzal. Cortés décida de l'offrirà son tour à Charles Quint, roi d'Espagne et souverain du Saint Empire romain germanique. Le Dr Johansson explique à juste titre que contrairement à ce que rapporte l'histoire officielle la coiffe ne fut pas volée. Johansson rappelle tout aussi justement que nous ignorons à quel moment exact cette cargaison de présents arriva en Europe.
Depuis l'indépendance du Mexique en 1521, la fameuse coiffe a eu don d'empoisonner les relations entre les deux pays. Le rapide passage au pouvoir de l'empereur Maximilien de Habsbourg aurait pu permettre un retour de l'artefact au Mexique: il n'en fut rien.
Le thème du retour de la "Coiffe de Moctezuma" a été reprise par les politiques de tous bords ensuite, notamment après la Révolution mexicaine. Le Partido Revolucionario Institucional en a fait un des symboles de la "mexicanité", l'histoire officielle se chargeant de dénaturer le cadeau en vol manifeste de la part des colons.
La pièce a également connu de nombreuses restaurations au cours des cinq derniers siècles, pas toujours avec succès. Des ajouts, des remplacements de plumes hasardeux ont considérablement modifié l'aspect originel de cette pièce.
Pour le professeur Johannson, la coiffe de Moctezuma est un symbole important de l'identité mexicaine, au même titre que la Vierge de Guadalupe. Selon lui, il est nécessaire que les plus hautes autorités de l'état mexicain, à savoir le gouvernement et le président de la République formule une requête officielle auprès de leurs homologues autrichiens afin d'en exiger le retour au Mexique. M. Johannson rappelle que depuis la présidence d'Ernesto Zedillo, dernier chef d'état appartenant au PRI qui a gouverné le pays pendant 70 ans, les autorités mexicaines n'ont pas renouvelé leurs exigences. Le PAN (droite catholique conservatrice) au pouvoir depuis 2000 a certainement également voulu rompre avec une tradition de son vieil ennemi politique. On sait combien le président Calderón s'est retrouvé fort embarrassé à fêter les personnages emblématiques de la Révolution mexicaine comme Pancho Villa ou Francisco Zapat, situés à l'opposé du dogme politique panista et ennemis déclarés des conservateurs d'alors.
C'est oublier quand même qu'un accord a été retrouvé ces derniers mois entre le Mexique et l'Autriche pour procéder à un échange temporaire de la fameuse coiffe et du carrosse de Maximilien de Habsbourg. Soit dit en passant, je doute que les Autrichiens attachent autant d'importance à ce carrosse que les Mexicains à une coiffe qui n'est plus la leur depuis presque 500 ans...
Un proverbe français dit: "Donner, c'est donner. Reprendre, c'est voler". Dès lors, eût égard aux arguments proposés par Johansson sur l'authenticité de la pièce et sur le fait qu'il s'agisse d'un cadeau, est-il bien raisonnable d'exiger le retour de ce qui a été donné ? N'y a-t-il pas des symboles dont l'authenticité prêtent moins à discussion et qui pourraient renforcer le sentiment de patriotisme si présent dans ce pays ?
Que dire du masque de Pakal, des danses du Venado ou des Viejitos ou encore de la Guelaguetza et de la gastronomie mexicaine ? Ces deux dernières sont classées au patrimoine de l'humanité de l'UNESCO et donne une place incroyable au Mexique dans le monde. La coiffe dite de Moctezuma, elle, n'en fait curieusement pas partie.
Et puis depuis que Louis XV a abandonné les terres de Nouvelle France aux Anglais, la France réclame-t-elle le retour du Québec en son sein ? Ou le retour du Saint Suaire ?
J'attire votre attention sur le fait que j'admire beaucoup le travail de Patrick Johansson: j'ai eu la chance de suivre une série de lectures qu'il a faites à l'Ecole pratique des hautes études sur invitation de Michel Graulich. Nous avons égrainé dans Raíces le contenu de chaque séance de son cours sur la mort proposé ces dernières semaines à l'UNAM.
Si vous passez par ou vivez à Mexico, un petit tour à l'Instituto de la Judicatura Federal situé sur Sidar et Rovirosa 236, Colonia Del parque, s'impose: demain Eduardo Matos Moctezuma donnera une conférence sur la coiffe de Moctezuma à 9 heures du matin.
Réplique de la coiffe dite de Moctezuma.
Exposition Moctezuma : Tiempo y destino de un gobernante.
Photo : B. Lobjois prise le 14/07/2000.
Petit rappel des faits. Le 5 novembre 1519, un acte notarié catalogue des présents faits par le huey tlatoani tenochca Moctezuma à Cortés. Parmi eux figure une coiffe de plumes vertes de quetzal. Cortés décida de l'offrirà son tour à Charles Quint, roi d'Espagne et souverain du Saint Empire romain germanique. Le Dr Johansson explique à juste titre que contrairement à ce que rapporte l'histoire officielle la coiffe ne fut pas volée. Johansson rappelle tout aussi justement que nous ignorons à quel moment exact cette cargaison de présents arriva en Europe.
Depuis l'indépendance du Mexique en 1521, la fameuse coiffe a eu don d'empoisonner les relations entre les deux pays. Le rapide passage au pouvoir de l'empereur Maximilien de Habsbourg aurait pu permettre un retour de l'artefact au Mexique: il n'en fut rien.
Le thème du retour de la "Coiffe de Moctezuma" a été reprise par les politiques de tous bords ensuite, notamment après la Révolution mexicaine. Le Partido Revolucionario Institucional en a fait un des symboles de la "mexicanité", l'histoire officielle se chargeant de dénaturer le cadeau en vol manifeste de la part des colons.
La pièce a également connu de nombreuses restaurations au cours des cinq derniers siècles, pas toujours avec succès. Des ajouts, des remplacements de plumes hasardeux ont considérablement modifié l'aspect originel de cette pièce.
Pour le professeur Johannson, la coiffe de Moctezuma est un symbole important de l'identité mexicaine, au même titre que la Vierge de Guadalupe. Selon lui, il est nécessaire que les plus hautes autorités de l'état mexicain, à savoir le gouvernement et le président de la République formule une requête officielle auprès de leurs homologues autrichiens afin d'en exiger le retour au Mexique. M. Johannson rappelle que depuis la présidence d'Ernesto Zedillo, dernier chef d'état appartenant au PRI qui a gouverné le pays pendant 70 ans, les autorités mexicaines n'ont pas renouvelé leurs exigences. Le PAN (droite catholique conservatrice) au pouvoir depuis 2000 a certainement également voulu rompre avec une tradition de son vieil ennemi politique. On sait combien le président Calderón s'est retrouvé fort embarrassé à fêter les personnages emblématiques de la Révolution mexicaine comme Pancho Villa ou Francisco Zapat, situés à l'opposé du dogme politique panista et ennemis déclarés des conservateurs d'alors.
C'est oublier quand même qu'un accord a été retrouvé ces derniers mois entre le Mexique et l'Autriche pour procéder à un échange temporaire de la fameuse coiffe et du carrosse de Maximilien de Habsbourg. Soit dit en passant, je doute que les Autrichiens attachent autant d'importance à ce carrosse que les Mexicains à une coiffe qui n'est plus la leur depuis presque 500 ans...
Un proverbe français dit: "Donner, c'est donner. Reprendre, c'est voler". Dès lors, eût égard aux arguments proposés par Johansson sur l'authenticité de la pièce et sur le fait qu'il s'agisse d'un cadeau, est-il bien raisonnable d'exiger le retour de ce qui a été donné ? N'y a-t-il pas des symboles dont l'authenticité prêtent moins à discussion et qui pourraient renforcer le sentiment de patriotisme si présent dans ce pays ?
Que dire du masque de Pakal, des danses du Venado ou des Viejitos ou encore de la Guelaguetza et de la gastronomie mexicaine ? Ces deux dernières sont classées au patrimoine de l'humanité de l'UNESCO et donne une place incroyable au Mexique dans le monde. La coiffe dite de Moctezuma, elle, n'en fait curieusement pas partie.
Et puis depuis que Louis XV a abandonné les terres de Nouvelle France aux Anglais, la France réclame-t-elle le retour du Québec en son sein ? Ou le retour du Saint Suaire ?
J'attire votre attention sur le fait que j'admire beaucoup le travail de Patrick Johansson: j'ai eu la chance de suivre une série de lectures qu'il a faites à l'Ecole pratique des hautes études sur invitation de Michel Graulich. Nous avons égrainé dans Raíces le contenu de chaque séance de son cours sur la mort proposé ces dernières semaines à l'UNAM.
Si vous passez par ou vivez à Mexico, un petit tour à l'Instituto de la Judicatura Federal situé sur Sidar et Rovirosa 236, Colonia Del parque, s'impose: demain Eduardo Matos Moctezuma donnera une conférence sur la coiffe de Moctezuma à 9 heures du matin.
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