A l’occasion du livre Dioses del norte, dioses del sur(Ediciones Era), le quotidien la Jornada propose un long entretien avec l’anthropologue Alfredo López Austin dans son édition du 22 décembre 2008. Le livre part d’un constat simple selon ce dernier : le manque d’études comparatives entre les cultures mésoaméricaines et andines. Co-écrit avec le chercheur péruvien Luis Millon, l’ouvrage jetterait un pavé dans la mare d'une ignorance réciproque entre les deux foyers de civilisations les plus importantes des Amériques. Le but avoué des deux scientifiques est d'élargir les champs d'études des jeunes étudiants.
L'anthropologue Alfredo López Austin de l'Instituto de Investigaciones Antropológicas à l'Universidad Nacional Autonóma de México.
Photo de Carlos Cisneros pour la Jornada.
Tout d'abord, Alfredo López Austin rappelle que les cas de rapprochement entre ces deux domaines de la recherche américaniste existaient avant leur recherche. Il explique qu'il dirige son travail aux andinistes et que son collègue Millones dirige le sien aux mésoaméricanistes. Un des aspects où les civilisations andines et mésoaméricaines se rejoignent est la religion, particulièrement les mythes de création. Et López Austin de citer celui d'une jeune tisseuse vierge qui maintient son métier entre un arbre et sa ceinture. Un petit oiseau l'approche et la rend enceinte. Elle donne alors naissance à un grand personnage, en l'occurrence, le soleil.
López Austin et son collègue ne prétendent pas expliquer toutes ces similitudes parce qu'il est nécessaire d'étudier complètement ces mythes dans l'iconographie et dans les rites avant de faire des comparaisons et de tirer des conclusions. L'anthropologue se risque cependant à exposer une hypothèse qui mérite d'être vérifiée : "une très ancienne conception panaméricaine du cosmos" héritée des premiers hommes ayant peuplé l'Amérique. Mais ils restent prudents et estiment que cette hypothèse, aussi intéressante soit-elle, doit reposer sur des bases fermes. Les preuves de contacts entre la Mésoamérique et les Andes ne suffisent pas à expliquer des mythes et des pratiques rituelles parallèles. L'article de la Jornada revient notamment sur le concept de dualité particulièrement développé et marqué dans les deux cultures.
L'auteur de Pasado Indigena termine l'article de la manière : Dioses del norte, dioses del sur est une étude sur l'autre car " l'autre est l'unique miroir qui me permet de me voir par contraste, par complément et par opposition. Pourquoi ne nous comprenons-nous pas au moyen de la comparaison avec d'autres personnes qui peuvent nous ressembler ? " Il juge en effet que cette remise en question nous permet de mieux cerner la construction culturelle à travers le temps. Elle est nécessaire dans la mesure où une vision hégémonique light balaie d'un revers de main la pluralité culturelle et cherche à fabriquer de bons producteurs et de de bons consommateurs. Ad finem, elle produit un déracinement chez l'être humain.
Bibliographie sélective d'Alfredo López Austin.
1973. Hombre-dios. Religión y política en el mundo náhuatl. IIH, UNAM, Mexico, 211 p. [1998].
1980. Cuerpo humano e ideología. Las concepciones de los antiguos nahuas. 2 vols., UNAM, Mexico.
1990. Los mitos del tlacuache. Caminos de la mitológia mesoamericana. Alianza Editorial Mexicana, Mexico.
1994. Tamoanchan y Tlalocan. FCE, Mexico.
Co-auteur avec Leonardo López Luján.
1999. Mito y realidad de Zuyuá. FCE, Serie Ensayos, Mexico.
2000. « The Myth and Reality of Zuyuá : The Feathered Serpent and Mesoamerican Transformation from the Classic to the Postclassic ». In Mesoamerica’s Classic Heritage : from Teotihuacan to the Aztecs, David Carrasco ; Lindsay Jones et Scott Sessions (éds.). UCP, Boulder, p. 21-84.
2007. « Serpiente Emplumada : el hombre y el dios ». In Isis y la Serpiente Emplumada, 2007, p. 152-165.
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